Euthanasie en France : "Le suicide assisté permet d'éviter la souffrance"Istock
TEMOIGNAGE. À 74 ans, Lucie milite pour la légalisation du suicide assisté. Refus de souffrir, d'être dégradée ou dépendante... Elle explique à Planet pourquoi son choix sera définitif.
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A-t-on le droit de choisir comment on souhaite mourir ? Le débat sur la fin de vie est de nouveau au cœur de l’actualité après les dernières déclarations d’Emmanuel Macron. Le président de la République a annoncé ce mardi 13 septembre le lancement d’une consultation citoyenne sur la fin de vie, avec pour objectif un nouveau "cadre légal" d’ici la fin de l’année 2023.

Euthanasie : "une aide active à mourir" bientôt appliquée ?

Dans un communiqué publié dans la journée, le palais de l’Elysée a précisé que cette convention citoyenne sera organisée par le CESE (Conseil économique, social et environnemental), dès le mois d’octobre pour des conclusions qui seront rendues en mars 2023. Des débats seront également organisés dans les territoires "afin d’aller vers tous les citoyens et leur permettre de s’informer et de mesurer les enjeux qui s’attachent à la fin de vie", ajoute le communiqué, cité par Le Point. Ces déclarations font suite à la publication d’un avis du Comité consultatif national d’éthique, qui juge qu’une "aide active à mourir" pourrait s’appliquer dans notre pays, mais "à certaines conditions strictes".

Actuellement, la fin de vie des malades incurables est encadrée par la loi Claeys-Leonetti de 2016, qui interdit l’euthanasie et le suicide assisté. Pour les malades en phase terminale et en grande souffrance, lorsque le pronostic vital est engagé, une "sédation profonde et continue" est tout de même possible. Les traitements peuvent également être arrêtés par les médecins en cas d’acharnement thérapeutique et un patient peut lui-même demander à tout arrêter. S'il ne peut pas s'exprimer et qu'il n'a pas laissé de directives claires, ce sont aux médecins de se prononcer sur la question. 

Même s’il est interdit, le suicide assisté est le choix de certains Français qui n’ont pas envie de souffrir plus longtemps que nécessaire. Rencontre avec l'une d'entre eux.

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Euthanasie : le suicide assisté "pour ne pas être dépendante"

Lucie, 74 ans est adhérente à l’association Ultime Liberté, qui milite pour l’euthanasie volontaire et la légalisation du suicide assisté. Elle définit ce dernier comme le souhait d’une personne qui "veut cesser de vivre et qui demande à ne pas être seule dans ce moment où elle va passer de vie à trépas". Elle ajoute que cette personne "veut un suicide qui ne soit pas violent" : "On a le droit de se suicider en France, mais le problème c’est que c’est d’une véritable violence, avec beaucoup de souffrance. Se jeter sous un train, d’un pont, se tirer une balle dans la tête… C’est terrible. Le suicide assisté permet d’éviter cette souffrance, cette violence", ajoute-t-elle.

Si ce choix se présente à elle, Lucie sait qu’elle optera pour un suicide assisté, pour "ne pas être dépendante, ne pas être dégradée". "J’ai vu autour de moi quelques personnes qui ont eu une vie intéressante, importante, qui se retrouvent après un accident – un AVC, une crise cardiaque – comme un petit animal qu’on lave. C’est une dégradation, de la maltraitance", confie-t-elle à Planet

Bien qu'elles soient dans une totale illégalité en France, des personnes en fin de vie, le plus souvent malades, ont déjà fait ce choix, aidées par des proches. C'est notamment le cas du cinéaste Jean-Luc Godard, qui a eu recours au suicide assisté en Suisse, où il est autorisé. Il y a deux ans, il disait déjà ne pas vouloir "être traîné dans une brouette" s'il était trop malade.

Légal ou pas, le suicide assisté est un choix sur lequel Lucie ne reculera pas. Voici pourquoi.

Euthanasie : "Rien ne me fera changer d'avis"

Lucie sait qu’il faudra encore du temps à l’Hexagone pour légaliser le suicide assisté, alors que plusieurs de nos voisins européens ont sauté le pas : "On est très en retard par rapport à d’autres, il y a une très grosse résistance en France". Lorsqu’elle en parle autour d’elle, Lucie suscite soit de l’intérêt, soit du dégoût : "Certains demandent des explications, d’autres ne veulent absolument pas en entendre parler".

Si elle est confortée dans son choix malgré ces réticences, c'est aussi parce qu'elle regrette certaines situations, dont elle a été témoin : "On garde les personnes âgées dans des conditions épouvantables, alors que la médecine a fait des progrès. On parle de personnes qui continuent à vivre à fortes doses de médicaments, de perfusions, mais qui n’ont plus aucune autonomie", explique-t-elle. Pas question que cela lui arrive, la septuagénaire a pris sa décision. Un événement pourrait-elle la faire changer d’avis ? "Si un jour je ne peux plus marcher, si je ne vois plus clair, ça sera définitif, rien ne me fera changer d’avis", conclut-elle.