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Ils sont nombreux à s'y être essayés… avant de s'y casser les dents. Plusieurs figures de la politique française ont, en effet, tenté de réformer l'univers de l'automobile d'une façon ou d'une autre. Récemment encore, Emmanuel Macron devait faire face à la colère des usagers de la route auxquels il comptait imposer une hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Les manifestants, tous habillés d'une chasuble de haute visibilité, se faisaient alors appelés les "Gilets jaunes". A plus d'une reprise, ils sont montés jusqu'à la capitale où de nombreuses rixes avec les forces de l'ordre ont fait plus de 2 500 blessés, d'après Amnesty. Lors de la précédente mandature, c'est Ségolène Royale qui essuyait l'ire des Bonnets rouges bretons, qui protestaient contre la taxe poids lourds, les plans sociaux dans l'agroalimentaire ainsi que l'écotaxe pour laquelle militait la ministre. Leur mobilisation a su faire ployer le gouvernement d'alors, que dirigeait Manuel Valls.
De toute évidence, Emmanuel Macron n'a pas (beaucoup) appris de ses erreurs. En effet, il travaille aujourd'hui à l'élaboration d'une nouvelle réforme susceptible de pousser bien des automobilistes dans la rue, si elle était amenée à voir le jour. Du moins, c'est ce que soutient Pierre Chasseray, délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes, contacté par Planet. Selon lui, si rien n'est fait, la situation est irrémédiablement amenée à déraper. Potentiellement plus qu'elle ne l'a jamais fait jusqu'à présent. Mais à partir de quand ?
Réforme de la ZFE : de quoi parle-t-on ?
Commençons par poser les bases : la réforme qui pourrait pousser certains français à l'émeute concerne, une fois n'est pas coutume, l'automobile. Néanmoins, il n'est plus question de taxe ou de hausse de tarifs du carburant. Et pour cause ! L'exécutif veut, cette fois, mettre en place des zones dans lesquelles certains véhicules, jugés polluants, ne seront pas en mesure de circuler.
On parle alors de "ZFE", pour "Zone à faible émission", informe le gouvernement sur son site. Elles "consistent à restreindre progressivement la circulation des véhicules polluants selon leur vignette Crit'Air (ou certificat qualité de l'air)", peut-on lire sur la plateforme officielle. "Elles visent notamment à accélérer le rajeunissement du parc de véhicules circulant, diminuer les émissions de polluants atmosphériques liées au trafic routier, réduire le nombre de personnes exposées à la pollution de l'air, encourager le développement de nouvelles mobilités", y est-il encore écrit.
"C'est une zone à forte exclusion", tranche d'entrée de jeu Pierre Chasseray, qui ne cache pas une seule seconde combien l'idée lui déplait. "On interdit aux gens de rouler, s'ils n'ont pas les moyens de changer de véhicule. Cette mesure est dictée par une certaine forme d'extrémisme égoïste et hypocrite puisqu'elle est poussée par des écolo-bobos parisiens qui ne veulent pas de la voiture des autres sous leurs fenêtres mais qui n'hésitent pas une seule seconde à aller polluer chez les autres", s'agace-t-il. Et d'affirmer qu'une pareille réforme renverrait probablement les manifestations de gilets jaunes à un jeu de cour d'école…
Réforme de la ZFE : "Si on ne fait rien, on aura droit aux gilets jaunes puissance 10"
De plus en plus de titres de presse s'attardent sur la réalité de ces ZFE ; tant et si bien que d'aucuns pourraient craindre une explosion des frustrations très rapide. "Les gens tombent des nues en apprenant qu'ils ne pourront plus utiliser leur bagnole", indique ainsi Le Monde, qui expliquait récemment combien cette réforme pouvait inquiéter les foyers les plus modestes du pays. Cependant, d'après Pierre Chasseray, la jacquerie qui guette ne devrait pas survenir tout de suite. Elle n'en sera pas moins violente, si rien n'est fait.
"L'explosion ne saurait avoir lieu à la rentrée. Le peuple français descend de la génération de 1789, il se rebelle toujours au moment opportun. Pour l'instant, 60% des Françaises et des Français ignorent encore ce qu'est une ZFE. Quand je dis qu'une émeute pourrait avoir lieu, je me fais lanceur d'alerte, c'est mon travail de responsable associatif", détaille le délégué général de 40 millions d'automobilistes.
"J'attire l'attention sur ce qui risque d'arriver en 2024, un an avant l'entrée en vigueur de la réforme. Si on ne fait rien d'ici là, on aura forcément les gilets jaunes puissance 10. On est en train d'expliquer aux gens qu'il n'auront plus le droit d'aller faire leurs courses, qu'ils ne pourront pas aller récupérer leurs enfants à l'école, ou aller sur leur lieu de travail. Qu'ils n'auront pas non plus droit d'aller boire un verre chez leurs amis. Tout ça parce que leur voiture, qui fonctionne toujours très bien, pollue trop. Mais c'est idiot - et pas franchement écolo ! - de l'envoyer à la casse alors qu'elle roule ?", s'indigne le père de famille, pour qui l'absence de sanction contribue, pour l'heure, à rendre la situation abstraite aux yeux des usagers de la route. Des propos qui ne sont pas sans rappeler ceux tenus aussi devant nos confrères du portail Yahoo.
Réforme de la ZFE : ce que cela signifie concrètement pour vous
Quiconque se fait prendre à rouler, avec un véhicule interdit, dans une zone à faible émission, devra, à terme, s'acquitter d'une amende. Son montant a été fixé à 68 euros. "C'est énorme. C'est un véritable gouffre financier pour les automobilistes", commente d'entrée de jeu Pierre Chasseray. D'autant plus, soutient-il, qu'une part conséquente des véhicules parmi ceux encore en circulation pourraient être interdits de rouler. Avec son association, il en dresse une liste rapide, à titre d'exemple.
"Il ne faut pas perdre de vue que la vignette Crit'Air évoluera constamment… et par conséquent, cela veut dire qu'il faudra changer de voiture très régulièrement pour continuer à être en règle et en mesure de circuler dans l'une des dix plus grandes villes du pays. Ça n'a pas de sens", note encore le responsable associatif qui, il insiste, ne nie pas les problèmes que peuvent engendrer les véhicules polluants ou la mauvaise qualité globale de l'air.
"On sait tous que les voitures d'il y a 20 ans polluent davantage que celles d'aujourd'hui. C'est l'évidence même. Et il ne s'agit pas de dire qu'il n'y a pas de problème au global. Seulement, il s'agit de remettre les choses dans leur contexte : aujourd'hui, on nous explique que la pollution de l'air engendre chaque année 40 000 décès prématurés. Cela soulève plusieurs questions : d'abord, c'est quoi un décès prématuré ? A partir de quand estime-t-on qu'une mort survient plus tôt que ce qui aurait dû arriver théoriquement ?", questionne-t-il d'abord.
Et lui d'interroger, pour finir : "Ensuite, admettons que le chiffre soit juste, est-ce que cela le rend nécessairement pertinent ? Bien sûr il est effrayant, mais quelle est la dynamique globale, sur deux décennies ? Si on ne peut pas en tirer une tendance, il a nécessairement moins de valeur. Particulièrement quand on sait les progrès de toutes les industries (automobile, agroalimentaire, etc) devraient nous aider, tout autant que nous sommes à prendre la parole aujourd'hui, à respirer un air qui n'a jamais été aussi peu pollué".