Sarkozy, Hollande et maintenant Macron... Les présidents sont-ils condamnés à ne faire qu'un mandat ?AFP
Pour 69% des Français, Emmanuel Macron ne pourra pas être réélu en 2022. S'il échouait à prendre une seconde fois l'Elysée, il serait le troisième chef d'Etat à partir après un seul mandat. Une situation qui fait système ? Peut-être.
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Ils sont déçus. 62% des Françaises et des Français jugeraient l'action d'Emmanuel Macron insatisfaisante, à en croire le dernier sondage Elabe pour BFMTV. Et ce n'est pas le seul enseignement qui pourrait laisser un arrière goût amer au président de la République puisque 61% des sondés jugent qu'il devrait "prendre en compte la contestation" au sujet de la réforme des retraites et reculer jusqu'à abandonner son projet, qui doit pourtant être présenté en conseil des ministres ce vendredi 24 janvier 2020.

Pire ! Le chef de l'Etat pourrait connaître le même destin que certains de ses prédécesseurs. Près de 7 citoyens sur 10 sont convaincus qu'il ne sera pas réélu, quand bien même la présidentielle ne se tiendra pas avant 2022, que les intentions réelles de l'ancien ministre de l'économie ne soient pas encore connues. A ce stade, seuls 31% parient encore sur le président…

Ce qui n'est pas sans soulever certaines questions : après l'incapacité de François Hollande à se représenter et l'échec de Nicolas Sarkozy au second tour, faut-il penser que les locataires de l'Elysée ne pourront plus exercer plus d'un seul mandat ? "Avant de tirer des conclusions, rappelons qu'Emmanuel Macron, comme ses deux prédécesseurs, souffre d'une impopularité record au regard des autres présidents de la Vème République", note d'abord le politologue Raul Magni-Berton, qui analyse la situation pour Planet. "D'une façon générale, on constate une hausse de l'impopularité de nos dirigeants qui est due au fait que leur base électorale est sans cesse plus émaciée qu'elle ne l'était par le passée. Ils sont élus par un nombre de votants toujours moins élevé", alerte le chercheur. 

Emmanuel Macron était-il minoritaire dès son élection ?

"L'abstention grimpe, certes, mais en plus les voix se dispersent plus qu'auparavant. Par conséquent le noyau sur lequel se repose Emmanuel Macron, comme ceux sur lesquels se reposaient Nicolas Sarkozy ou François Hollande, sont moins solides. Ils étaient minoritaires dès leur élection", souligne-t-il. Une situation qui, mécaniquement, fragilise le pouvoir et peut l'empêcher de se représenter.

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"Cette crise de la représentativité politique est assez récente. Elle ne signifie pas que le président ne pourra pas être élu de nouveau mais elle implique aussi que son élection ne pourra pas toujours être garantie, y compris face à l'extrême droite. Le front républicain ne pourra pas toujours fonctionner", indique celui qui enseigne à l'Institut d'Etudes Politiques (Sciences-Po) de Grenoble.

Emmanuel Macron : un président aux yeux plus gros que le ventre ?

S'il est difficile, deux ans avant l'élection présidentielle, de formuler un postulat définitif, le chercheur identifie plusieurs obstacles qui se dressent entre le président et un second mandat. Tous pourraient sérieusement l'handicaper si, d'aventure, il se relançait dans une course à l'Elysée.

"Il n'est pas impossible qu'Emmanuel Macron ne passe pas le premier tour. D'abord parce qu'il est détesté par tout un pan de la population et que, dans le domaine politique, l'impopularité constitue un frein important", analyse-t-il.Non sans préciser ensuite son propos.

 "Spontanément, et indépendamment des sensibilités politiques, l'électeur aura tendance à soutenir le candidat le plus populaire qui lui correspond le plus. C'est un calcul qui peut sembler pertinent : cette figure est appréciée parce qu'elle est en mesure de rassembler et, par conséquent, a plus de chances de remporter l'élection. Il y a donc une prime à la popularité qui se fait au détriment des candidats moins forts", ajoute le politologue.

"Naturellement, s'il passe le premier tour il sera avantagé : en tant que centriste, il est favorisé par le système", nuance ensuite l'expert pour qui le désamour consommé entre Emmanuel Macron et la population est explicable. 

"Elle résulte avant tout d'un facteur précis : le président a entrepris des réformes conséquentes sans avoir le crédit pour le faire. Il s'est attaqué à de gros chantiers mais n'avait pas de base électorale suffisante pour prétendre les mener. Si la contestation ne s'effrite pas, c'est parce qu'elle est soutenue par la population, au moins partiellement. A l'inverse, si cette dernière était derrière le président de la République, la colère n'aurait pas pris aussi longtemps", note Raul Magni-Berton, qui rappelle que cela fait plus d'un an dorénavant que les contestataires se rassemblent et occupent la rue.

Faut-il s'attendre à un bouleversement durable de l'équilibre politique ?

"Le front républicain faiblit, c'est indéniable. L'extrême droite est plus banalisée qu'elle ne l'était par le passé et, aux yeux de certains à droite, elle devient fréquentable", décrypte le politologue pour qui la traditionnelle opposition gauche-droite - il réfute le terme "clivage" - n'est pas en passe de disparaître. Un état de fait qu'il juge d'ailleurs "malheureux".

"Quoiqu'en disent Emmanuel Macron ou Marine Le Pen, la gauche et la droite continuent de façonner le paysage politique français, parce que les gens se positionnent encore sur cet axe. Ils peuvent dire qu'ils ne sont ni de gauche, ni de droite, mais cela revient à fixer la gauche et la droite en référence. C'est un phénomène que l'on a observé chez les ‘gilets jaunes', par exemple : le mouvement se revendiquait apolitique mais a fini par faiblir parce qu'il était divisé en différent courants, certains marqués à droites et d'autres à gauche", rappelle le chercheur.

Et lui de conclure : "Par conséquent, les centristes qui parviennent à passer le cap du second tour demeurent avantagés : ils peuvent piocher dans la réserve de voix du camp éliminé et capitaliser sur le rejet de leur adversaire".