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Elle a réintégré, avec force et bruit, le débat public. Difficile de passer à côté de la réforme des retraites, que le président de la République a replacé au centre de toutes les discussions. Et pour cause ! Après un premier mandat s’étant soldé sur son incapacité à transformer le système de solidarité inter-générations à la française, Emmanuel Macron apparait littéralement “obsédé” par ce chantier, estime le politologue Jean Petaux dans nos colonnes. Il n’était donc pas question de ne pas réessayer… Cette fois, seulement, le président de la République n’ambitionne plus de renverser la table : il compte repousser l’âge légal de départ à la retraite pour progressivement contraindre les Françaises et les Français à travailler jusqu’à 65 ans au moins.
L’une des questions qui se pose le plus, pourtant, n’est pas celle des modalités exactes de la réforme. C’est celle de sa faisabilité politique : plus qu’interroger sa nécessité économique (souvent avancée par les élus qui défendent le projet d’Emmanuel Macron), il est ici sujet de la façon dont le président et sa majorité aborderont la fabrique du texte de loi à proprement parler. Nombreux sont ceux qui craignent, désormais, une tentative de passage en force de la part du gouvernement. Qu’entend-on exactement par là ?
Passage en force sur la réforme des retraites : de quoi est-il question, au juste ?
Dans les faits, plusieurs options demeurent sur la table pour l’exécutif. Il peut ainsi décider de présenter un projet de loi à part, de façon assez classique, sur lequel il décidera ou non d’invoquer l’article 49-3. Faute d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale, rappelle France Info, il s’agit-là d’un scénario assez plausible… Quand bien même le groupe présidentiel devra bien choisir son moment : il n’est possible de recourir à cet article qu’une fois par session, précisément pour éviter les passages en force. Griller un tel joker peut donc s’avérer risqué, en plus d’exposer le gouvernement en cas d’échec,ainsi que l’expliquait le politologue Raul Magni-Berton dans nos colonnes.
Réforme des retraites : l’option du PLFSS
Autre option, d’ores et déjà évoquée dans nos colonnes : le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023. Comme l’expliquait l’économiste Alexandre Delaigue, opter pour un amendement visant à faire passer la réforme des retraites sur le PLFSS ne présente pas d’irrégularité particulière, sur le plan constitutionnel. Cependant, cela garantirait (ou presque) la possibilité au gouvernement de faire passer sa loi.
"Ce genre d’initiative sent, de fait, l'expédient politique. Difficile de ne pas y voir une volonté de ne pas débattre, puisque le budget compte parmi les textes de loi qui ne peuvent pas ne pas être voté. C’est une question pratique : il faut pouvoir payer les fonctionnaires l’année prochaine, par exemple", rappelle ainsi l’économiste.
Ce choix risque aussi, souligne France Info, de braquer les syndicats. La rentrée pourrait s’annoncer assez tendue…
Réforme des retraites : qui sont ceux qui ne veulent pas d’un passage en force ?
Plusieurs, du côté d’Emmanuel Macron, s’opposent d’ores et déjà à un éventuel passage en force du côté de la réforme des retraites. C’est le cas de l’un de ses premiers soutiens : François Bayrou. Le président du MoDem, qui a été ministre au début du précédent quinquennat, s’est prononcé contre toute adoption de la réforme sans concertation. Il a d’ailleurs invoqué “l’esprit du Conseil national de la refondation”, dont on lui a confié la présidence. Ceci étant dit, il ne rejette pas l’emploi du 49-3, comme l’écrit le Huffington Post. “Il n’y a rien d’infamant à utiliser le 49-3. Ce qui n’est pas normal c’est utiliser le 49-3 sans la préparation nécessaire pour le texte”, a-t-il déclaré.
La CFDT, qu’Emmanuel Macron a pu considérer comme un allié, s’est aussi positionnée dans l’opposition. “S’il y a un amendement dans le PLFSS sur les retraites, la CFDT, de facto, elle sort du CNR et des discussions sur tous les sujets”, a menacé Laurent Berger, son secrétaire général.