Le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) a publié jeudi 14 novembre son rapport d’enquête "Vécu et ressenti en matière de sécurité" réalisé en 2023. Plus que des sentiments...
Il manquait de temps pour y penser. Le chef de l'Etat, aidé de son équipe exécutive, fait front depuis des semaines contre le coronavirus Covid-19. Pourtant, à en croire le Canard Enchaîné, il aurait pu gérer bien mieux la situation, s'il avait accepté d'écouter l'un de ses ambassadeurs. En effet, l'hebdomadaire satyrique affirme, dans son édition du mercredi 6 mai 2020, qu'Emmanuel Macron savait. Dès décembre 2019, le président de la République était au courant.
C'est en tout cas ce qu'explique Laurent Bili, l'ambassadeur de France à Pékin. Il dit avoir contacté le palais de l'Elysée, mais aussi le ministère des Affaires étrangères, pour alerter les autorités hexagonales du danger qui pesait déjà sur le pays. "Quand sont parvenues à Paris les informations relatives à l'apparition d'un nouveau virus, il était encore possible, pour un président conscient de ses responsabilités, de constituer un bon stock de masques, de tests et de respirateurs. Mais Macron n'a pas trouvé le temps d'y penser", assène le journal.
La responsabilité pénale du président peut-elle être engagée ?
De quoi inquiéter le président de la République, sur le plan pénal ? Guillaume Jeanson, avocat au barreau de Paris et porte-parole de l'Institut pour la Justice – un think tank généralement marqué à droite –, en doute. "Probablement pas en raison du statut très protecteur qu'offre le texte de la constitution de la Vème République au chef de l'Etat, du moins pour les actes accomplis en sa qualité de président et dans le cadre de ses fonctions", rappelle-t-il d'entrée de jeu. Et lui de poursuivre :"Le Président de la République bénéficie en effet à leur égard d'une immunité de fond. Celle prévue par l'article 67 de la constitution qui dispose qu''il n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité'".
Aux yeux de Maître Jeanson, il s'agit évidemment d'un paradoxe. Ce dernier, rappelle-t-il, avait déjà été dénoncé "le 2 mai 2012 par François Hollande en ces termes : 'un président de tout, chef de tout et en définitive responsable de rien'". Une situation d'autant plus étonnante que "cette irresponsabilité est absolue, perpétuelle et personnelle". L'avocat insiste : "Cette irresponsabilité subsiste à l'issue du mandat. VGE avait ainsi refusé d'être auditionné en septembre 1984 dans le cadre de la fameuse affaire des avions renifleurs. Mais cette irresponsabilité ne s'étend pas pour autant aux collaborateurs du président. Dans l'affaire des sondages de l'Élysée, la directrice de cabinet du président Sarkozy a ainsi été mise en examen en février 2016."
Qu'aurait risqué le président de la République s'il ne bénéficiait pas de son immunité ?
Il n'empêche ! L'action du chef de l'Etat apparaît condamnable et, sans sa protection, il aurait pu s'avérer pénalement en danger. Quelques ministres s'inquiéteraient d'ailleurs de leur propre sort, comme ce serait le cas d'un certain... Edouard Philippe. "Si certains membres du gouvernement parlent trop, c'est pour anticiper d'éventuelles poursuites", rappelle d'ailleurs Le Figaro, dont les informations sont reprises par Gala. Le Premier ministre, estime le tabloïd, n'est "pas serein" et "craint les plaintes pénales". "Quand on regardera de ce qui s'est passé pour les masques, les tests, qu'on verra qu'on a commencé par dire 'merde' à Raoult, ça va être compliqué. La commission d'enquête, ça va être Nuremberg. Philippe est flippé", rapportait d'ailleurs un ministre, interrogé par le quotidien.
Concrètement, qu'aurait risqué le président s'il n'était pas aussi protégé ? Pour Guillaume Jeanson la réponse est claire. "Si on l'imaginait simple citoyen privé du bénéfice de son immunité (qui ne couvre d'ailleurs que les actes accomplis en sa qualité dans le cadre de ses fonctions), il pourrait alors s'exposer en théorie à différents types de recours allant du délit de mise en danger de la vie d'autrui à celui d'homicide involontaire pour les cas les plus graves", analyse-t-il.
Est-ce à dire que le président de la République ne peut jamais être inquiété ?
"Il reste toutefois une hypothèse prévue par l'article 68 de la constitution", nuance cependant l'avocat. Il poursuit, rappelant que l'article en question "a été réformé en 2007". "Suivant cet article, le président de la République peut être destitué 'en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat'", insiste-t-il Mais la situation peut s'aggraver !
"Comme l'écrit le professeur de droit constitutionnel Gicquel, dans l'éventualité ou les faits reprochés au chef de l'État recevraient au surplus une qualification pénale, dans le cadre de la procédure politique de destitution, ils donneraient lieu, dans les termes du droit commun, à l'ouverture d'une procédure judiciaire, à l'issue de son mandat", explique encore Guillaume Jeanson.
Pour autant, une telle situation a peu de chance de voir le jour. "Cette hypothèse de destitution semble improbable car elle doit être prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour suivant une procédure particulière. La proposition de réunion de la Haute Cour doit au préalable être adoptée par une des assemblées du Parlement qui la transmet ensuite aussitôt à l'autre. Cette dernière doit alors se prononcer dans les quinze jours. La Haute Cour est présidée par le président de l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, Richard Ferrand. Elle statue dans un délai d'un mois, à bulletins secrets, sur la destitution et sa décision est d'effet immédiat », rappelle-t-il d'abord, avant de souligner que « la constitution précise que les décisions prises en application de cet article 68 le sont à la majorité des deux tiers des membres composant l'assemblée concernée ou la Haute Cour."
Mécaniquement, "toute délégation de vote est interdite". "Seuls sont recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution. Compte tenu de la composition de l'assemblée nationale, de sa présidence actuelle et de ces conditions drastiques, une telle hypothèse de destitution du président Macron paraît donc encore une fois assez improbable", tempère-t-il à nouveau.
Malgré tout cela, il demeure possible d'engager la responsabilité pénale du président, "pour la commission des crimes les plus graves devant la cour pénale internationale crée par la convention de Rome du 17 juillet 1998", indique l'avocat. "Mais les faits dont il est ici question ne répondent évidemment pas à cette qualification". Dans le cas présent, donc, "le président est donc assez bien protégé".