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Contre la grève et pour un régime universel, le chemin de la sagesse
Nul ne peut récuser le droit aux syndicats d’appeler à la grève à partir du 5 décembre au sujet du système des retraites qui constitue un des éléments constituant majeur du pacte social du pays. Néanmoins, cet appel à la grève intervient avant même la publication d’un texte de la part du gouvernement. Seules quelques préconisations servent de fondements justifiant par effet de précaution cet appel. Jamais, un mouvement social n’a fait l’objet d’une couverture médiatique en amont aussi importante. La compétition, la concurrence entre les chaines d’information est telle qu’elles ont une tendance naturelle à monter aux extrêmes tout évènement. A écouter, à regarder certains journaux, nous avons l’impression d’être au bord de la guerre sociale. Les partenaires sociaux qui s’étaient laissés déborder par la crise des gilets jaunes et qui depuis l’élection d’Emmanuel Macron étaient devenues des forces subalternes tentent près d’un quart de siècle après les fameuses grèves de 1995 de se replacer au centre du jeu. Au-delà des jeux syndicaux, la question centrale demeure le régime de retraite et son financement.
Depuis 1993, la France est engagée dans un processus de réforme de son système de retraite afin de l’adapter à un phénomène sans précédent dans l’histoire contemporaine, le vieillissement de la population. Du fait du baby-boom d’après-guerre et de l’allongement de l’espérance de vie après 60 ans, le nombre de retraités qui était de 5 millions en 1980 dépassait, en 2018, 16 millions. Chaque année, le nombre de retraités s’accroît de 200 000. Le ratio cotisants / retraités qui était de 4 pour un est désormais de 1,6 et devrait tendre vers 1,4 d’ici une vingtaine d’années. L’instauration d’un régime par points ne résout pas la question du financement des pensions qui restera entier mais constitue un indéniable progrès en termes de pilotage et de transparence.
Depuis 1673, année de la création du premier régime de retraite pour les marins, notre système de retraite s’est construit au fil de l’eau. Il est le miroir de notre histoire sociale. Avec 42 régimes de base, une centaine de régimes complémentaires, la complexité est à tous les coins de rue avec à la clef chez les assurés de la suspicion et des frustrations. La défiance transcende l’ensemble du pays tout comme la jalousie. Les régimes spéciaux génèrent de l’envie et de l’aigreur. A tort ou à raison, une proportion importante de Français estime que certaines catégories d’actifs seraient mieux traitées au niveau de la retraite que d’autres. La mise en place d’un socle commun de retraite sans éteindre le fiel en diminuerait l’âcreté.
"Le navire se dirige vers un récif, mais surtout il ne faut pas changer de route !"
Les régimes spéciaux ont refusé, en 1946 de rejoindre le régime général de retraite, qui ne l’est donc pas. Ce sont des régimes mis en place avant la Seconde Guerre mondiale au sein d’entreprises nationales ou de secteurs d’activités qui se caractérisaient par une forte présence des syndicats (énergie, transports) et par des droits plus généreux que ceux du régime général. Les bénéficiaires des régimes spéciaux mettent en avant que leur couverture vieillesse est un des éléments fondamentaux de leur contrat de travail et qu’il n’est pas possible de le remettre en cause. Ce qui vaut pour les salariés de la SNCF, de la RATP ou des fonctions publiques vaut aussi pour les salariés du privé. Ainsi, toute réforme serait impossible. le navire se dirige vers un récif mais surtout il ne faut pas changer de route.
Avec un système par points, le mode de calcul des pensions serait identique pour tous. Les trois facteurs clefs seraient la valeur d’achat et celle de service du point ainsi que l’âge de liquidation. Des opposants au régime unique mettent en avant que le Gouvernement pourrait ainsi facilement baisser les pensions. Mais la question se pose tout autant dans le système actuel. Dans le premier système, les outils de régulation seraient bien plus simples et visible de tous que dans le second. Croire que les régimes par annuités garantissent un niveau de pension, est une illusion d’optique totale. Par ailleurs, la quasi-totalité des actifs disposent déjà de régimes par points à travers les complémentaires qui assurent plus de 50 % des pensions pour les cadres.
"Dans un système par répartition, il y n'a pas de droit acquis à la retraite"
Un régime universel est une source d’économies de gestion. Il est moins coûteux de gérer un régime que 42. Pour les assurés qui sont de plus en plus nombreux à dépendre durant leur vie professionnelle de plusieurs statuts, l’instauration d’un régime unique sera également une simplification. En outre, les poly-pensionnés étaient souvent perdants par rapport aux autres assurés.
La création du régime universel pose la question de la dévolution des réserves constituées par certaines caisses. Dans un système par répartition, contrairement à certaines allégations, il n’y a pas de droits acquis. Ce sont les cotisations qui financent les pensions avec comme principe la mutualisation. Aujourd’hui, celle-ci est complexe. Elle s’opère par un jeu de compensations inter-régimes. Le régime général et les régimes des professions libérales ainsi que le régime complémentaire des collectivités locales sont mis à contribution pour financer les régimes déficitaires comme ceux des mines ou de la SNCF. Nul n’imagine de priver les mineurs de leurs pensions. Des régimes actuellement excédentaires aujourd’hui peuvent demain devenir déficitaires. Ils pourront alors compter sur la solidarité nationale. Dans un régime universel, cette compensation est plus simple car elle s’effectue automatiquement à l’intérieur.
Equité, simplification, pilotage plus simple, la France s’enorgueillirait à suivre l’Allemagne sur le chemin du régime par points. Le régime universel ne signifie pas le menu unique. Les spécificités liées à l’emploi doivent être prises en compte. Des mécanismes de solidarité doivent être prévues pour éviter que des personnes ayant rencontrés des problèmes durant leur carrière soient lésés en passant d’un système retenant les 25 meilleures années à un système assis sur les cotisations versées durant toute la vie professionnelle comme cela est déjà le cas pour les complémentaires.
Philippe Cevel est économiste, spécialiste des questions macroéconomiques. Il est aussi le fondateur de la société d'étude et de stratégie économiques Lorello Ecodata. Il préside aujourd'hui le Cercle de l'Epargne, un centre d'études et d'information consacré spécifiquement à l'épargne et à la retraite.