Face à la montée des cyberattaques, le FBI et la CISA recommandent d’arrêter d’envoyer des SMS entre utilisateurs d'iPhone et d'Android. Un conseil qui ne vise pas seulement les Américains mais tous les...
Le chef de l'Etat est inquiet et c'est pourquoi il a fait passer des consignes très claires. Quelques heures seulement après la jugement de Nicolas Sarkozy, condamné en première instance à trois ans de prison dont deux avec sursis pour corruption dans l'affaire dite "des écoutes", Emmanuel Macron a donc tenu à briefer son entourage, dévoile Europe 1. Et pour cause ! Il a toujours perçu l'ancien président de la République comme une menace politique, un "vieux lion" qu'il valait mieux avoir à ses côtés qu'en tant que vis-à-vis.
Il ne faut donc pas s'attaquer à Nicolas Sarkozy et moins encore l'humilier. Avec dans l'idée la possible récupération de son électorat en vue de l'élection présidentielle de 2022. L'ancien locataire de l'Elysée jouit encore d'un prestige certain au sein de sa famille politique. Tant et si bien qu'Emmanuel Macron a raison de se soucier de tels enjeux, estime Christophe Bouillaud, politologue, enseignant-chercheur en sciences politiques à l'IEP de Grenoble.
Nicolas Sarkozy pourra-t-il permettre à Emmanuel Macron de l'emporter en 2022 ?
"Nicolas Sarkozy est sans doute la seule personne capable de convaincre Les Républicains de se rallier au président. Emmanuel Macron est en quête d'un parti structuré tandis que LR se cherche un chef. Si Nicolas Sarkozy donnait son aval à un rapprochement, il permettrait la conversion vers LREM de l'essentiel des cadres et des électeurs de LR", estime en effet l'enseignant. "Si c'était effectivement le cas, les candidates et les candidats de droite se préparant pour 2022 seraient alors invités à passer leur tour, à faire preuve de patience. Car, il faut bien le dire, les lignes idéologiques de LR et LREM sont très proches. Ce qui pose problème, fondamentalement, ce sont les affaires de boutiques et d'ambitions personnelles", poursuit-il. A Nicolas Sarkozy, donc, de jouer les marieurs.
"Il est dans les affaires depuis longtemps, la condamnation ne change pas la donne. Les 'sarkolâtres' continueront de toute façon à le soutenir, même si je n'ai jamais cru à son retour", assène pour sa part un membre du gouvernement anonyme, contacté par Le Figaro. Ce qui ne rend pas nécessairement l'ancien chef d'Etat moins dangereux…
Nicolas Sarkozy est-il devenu plus dangereux depuis qu'il a été condamné ?
Une chose est sûre : la condamnation de Nicolas Sarkozy en première instance pourrait réactiver son électorat traditionnel. "C'est probable, au vu du discours qu'il a tenu de manière constante, laissant en permanence entendre que tout jugement prononcé à son encontre serait le fruit d'un complot", note Christophe Bouillaud.
L'ancien chef de l'Etat l'a dit, il n'entend pas se relancer en politique. Ou du moins, pas pour briguer l'Elysée. Ce qui ne signifie pas qu'il soit désormais démuni de toute influence en la matière.
"Sa contre-attaque très organisée et très médiatisée lui redonne une stature qu'il n'avait plus vraiment ces derniers mois, celle de garant de la droite. Il conserve, dès lors, une auréole de martyr de la droite. Son discours, qui ne changera guère en cas d'autre condamnation, devrait lui permettre de s'enkyster dans le paysage politique français à la manière d'un Berlusconi autant que d'apparaître comme une victime des juges et de Mediapart…", poursuit l'enseignant-chercheur, non sans souligner qu'aux yeux d'une partie de la population française, les faits reprochés à Nicolas Sarkozy, bien qu'illégaux, ne posent pas un réel problème de conscience.
Nicolas Sarkozy condamné en première instance : faut-il juger plus sévèrement les politiques ?
La démocratie pourrait se retrouver fragilisée par cette décision. Ou, du moins, elle aurait pu, si Nicolas Sarkozy avait décidé de jeter en combat front contre front les pouvoirs de la République, explique-t-il au Figaro à qui il a accordé une longue interview.
Du reste, une partie de la classe politique, n'a pas hésité à dénoncer la fameuse "République des juges". Une rhétorique qui ne fait pas sens, estime pour sa part Christophe Bouillaud. "Il s'agit en fait de dire, en tant qu'homme ou que femme politique, que l'on souhaite rester dans une situation où tout jugement est perçu comme une atteinte à la liberté. Ils ne veulent simplement pas être jugés comme des citoyens lambdas et Marine Le Pen l'avait presque dit en ces termes, quand elle déclarait à son propre propos que la décision reviendrait au peuple plutôt qu'aux tribunaux", décrypte le politologue.
Et lui de poursuivre : "C'est amusant, parce que c'est une conception de la justice qui existait déjà par le passé, notamment durant le Haut Moyen-Âge et à la fin de l'antiquité, chez les Francs ainsi que les Gallos-Romains. Pour autant, avoir l'aval du peuple n'autorise pas à faire n'importe quoi. Et notre démocratie sera renforcée quand nos politiques réaliseront qu'ils ne sont pas au-dessus des lois".
La situation est d'autant moins impactante, à échelle institutionnelle, que Nicolas Sarkozy n'est pas un leader politique actif, explique le chercheur. "Cela fragilise mécaniquement l'argument, puisque même s'il se retrouvait emprisonné, le fonctionnement de nos institutions ne serait pas modifié", détaille-t-il.
Pour ne pas prendre le risque de fragiliser la démocratie, il faudrait selon lui mettre un terme au sentiment d'une impunité des politiques en France. Ce qui passe notamment par deux éléments essentiels : juger plus fermement les politiques et cesser d'accorder de l'importance aux condamnations qui n'ont pas eu lieu en dernière instance. "Les femmes et les hommes politiques sont supposés incarner l'intérêt général. Ils votent les lois, participent au processus législatif… Dès lors, comment justifier qu'eux-mêmes puissent les ignorer ?", questionne-t-il.