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Pénurie d’électricité à venir : la France est elle concernée ?
Lundi dernier, la ministre belge de l’Energie, Marie-Christine Marghem, a évoqué le risque d’une pénurie d’électricité à échelle nationale cet hiver. Nos voisins belges pourraient donc manquer d’électricité dès novembre, en raison du report du redémarrage de plusieurs réacteurs nucléaires. Le pays doit d’ailleurs s’entretenir avec le secteur énergétique belge ainsi qu’avec les ministres des pays limitrophes, rapporte Le Figaro. Il s’agit "de maintenir une sécurité d’approvisionnement stable et suffisante", indique la ministre. Un drame qui pourrait bien frapper la France également.
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"Le risque d’une pénurie d’électricité en France n’est évidemment pas à exclure. En situation de grand froid, nous atteignons d’ores et déjà la limite de notre capacité de production", confirme Stephan Silvestre, ingénieur en optique physique, docteur en sciences économiques, professeur à la Paris School of Business et membre de la chaire des risques énergétiques. Il est également le co-auteur de deux ouvrages sur le sujet de l’énergie : Perspectives énergétiques (2013, Ellipses) et Gaz naturel : la nouvelle donne ? (2016, PUF). "Dès les premières températures négatives, le risque de pénurie existe. Il est difficile d’en mesurer la probabilité avec exactitude toutefois, pour l’hiver prochain, la situation ne devrait pas être critique. Le danger demeure contenu entre 2 et 10% environ", poursuit l’ingénieur, qui n’exclut pas que régionalement, le risque soit "plus élevé".
Pénurie d’électricité à venir : pas de chauffage de l’hiver ?
Est-ce à dire qu’en Bretagne ou en PACA, les régions les plus concernées, on risque davantage de ne pas pouvoir se chauffer en cas de grand froid ? Pas forcément, explique l’enseignant. "Ce n’est a priori pas le contribuable qui est le plus en danger. Dans le cas d’une pénurie réelle et confirmée, le gestionnaire du réseau (RTE) préfère délester les entreprises plutôt que les foyers qui sont généralement mieux protégés", souligne le membre de la chaire des risques énergétiques.
"Deux créneaux horaires peuvent être difficiles à gérer pour les fournisseurs d’électricité. On constate en effet un pic de la consommation le matin, entre 7 et 9h, avant que les Français ne partent travailler. Le deuxième pic survient à leur retour, entre 18 et 21h", précise Stephan Silvestre, selon qui il n’y a pas de risque de voir le chauffage coupé en plein Paris-Moscou. "Certes, ces créneaux peuvent poser des problèmes temporaires, mais il n’y aura pas d’interruption de longue durée qui empêche de se chauffer. En outre, même si la France consomme beaucoup d’électricité, nous nous chauffons aussi beaucoup au gaz", rappelle-t-il.
Pénurie d’électricité à venir : la faute à un parc nucléaire obsolète ?
En Belgique, la crise qui est anticipée fait suite à la fermeture prolongée de multiples réacteurs nucléaires. C’est aussi un facteur d’inquiétude en France. "Une pénurie d’électricité serait, pour partie, liée à l’état de notre parc nucléaire. En moyenne, entre 2 et 6 de nos 58 réacteurs ne sont pas fonctionnels pour des raisons techniques ou des questions de maintenance", précise le professeur à la Paris School of Business, non sans rappeler que : "L’année passée, l’Etat avait décidé de prolonger la fermeture de plusieurs réacteurs. Le nombre d’inactifs était donc supérieur à la moyenne. Naturellement cela a engendré des soucis de disponibilité en plein pic hivernal. Cette situation ne devrait pas se reproduire dans l’immédiat, puisque les opérations de maintenance ont été réalisées."
Cependant, compte-tenu de l’âge du parc nucléaire français et du renforcement salutaire des normes de sécurité, la situation se reproduira nécessairement à l’avenir, au moins dans un futur proche estime l’enseignant. "Sur le long terme, l’obsolescence de nos centrales est un problème qui devrait se résorber. C’est lié au remplacement des EPR et au développement de la part du renouvelable dans la production d’énergie".
Au-delà du parc nucléaire français, d’autres facteurs sont à prendre en compte. Les conditions météorologiques ont également un impact sur la production d’électricité. "En cas de grand froid, l’énergie renouvelable est plus difficile à produire : il y a généralement moins de vent pour faire tourner les éoliennes, les panneaux solaires sont moins efficaces. Quant aux barrages hydrauliques, ils sont à sec et ne permettent pas de générer de l’énergie. C’est pourquoi l’Etat n’a pas encore fait fermer les ressources d’appoint, qui utilisent du charbon, qu’utilise EDF pour pallier ses manques", détaille Stephan Silvestre. "En cas de besoin, la solution la plus courante consiste à acquérir des kilowatts sur les marchés européens, notamment auprès des Benelux. C’est très cher mais c’est un tarif que les fournisseurs sont prêts à payer." Une solution qui demeure potentiellement dangereuse : "Si les pays d’Europe du Nord sont soumis aux mêmes conditions météorologiques que la France, ils pourraient avoir du mal à fournir de l’énergie à l’Hexagone", conclut l’ingénieur.